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العنوان
La problématique du mal dans L’Homme qui rit de Victor Hugo /
المؤلف
Hassan, Inass Ali Hassanein.
هيئة الاعداد
باحث / Inass Ali Hassanein Hassan
مشرف / Hoda Mohamed Chamel Abaza
مشرف / Magdi Abdel-Hafez Saleh
تاريخ النشر
2015.
عدد الصفحات
382 p. ;
اللغة
الفرنسية
الدرجة
ماجستير
التخصص
الأدب والنظرية الأدبية
تاريخ الإجازة
5/10/2015
مكان الإجازة
جامعة عين شمس - كلية الآداب - langue et de littérature françaises
الفهرس
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Abstract

Au cours de notre étude, nous nous sommes interrogée sur la possibilité de considérer L’Homme qui rit comme une œuvre philosophique. Nous nous sommes interrogée également sur la conception globale du mal et sur ses différentes dimensions et ses figures qui se concrétisent dans des images. En effet, nous avons étudié les deux principales incarnations de l’esprit du mal : incarnations cosmiques et incarnations anthropomorphes. Pour ce faire, nous avons analysé des scènes descriptives narrativisées dans la première partie de la thèse. Dans la deuxième partie, nous avons eu recours à l’analyse du portrait ainsi que du discours des personnages. Le recours aux commentaires du narrateur était fondamental dans les deux parties. Nous avons suivi l’évolution de la pensée hugolienne dans le but de connaître la phase dans laquelle se situe L’Homme qui rit. Cette brève étude a été suivie d’une autre consacrée à l’évolution de la conception du mal au cours des siècles. Nous avons combiné plusieurs disciplines dans l’objectif de mener une analyse approfondie et d’aboutir à la démonstration de la spécificité de L’Homme qui rit comme une «œuvre clé», une œuvre philosophique qui condense des convictions abordées de façon fragmentaire dans les différentes œuvres hugoliennes. Nous avons tenté de cerner la question du mal chez d’autres penseurs; nous avons pu dégager certaines ressemblances qui pourraient être interprétées comme source de la conception hugolienne.
Nous avons constaté que la question du mal forme une unité d’idées cohérentes dans l’ensemble, ce qui fait de notre corpus une œuvre philosophique en soi. Hugo fonde ses idées sur un système solidement bâti. À l’intérieur de ce système, les thèmes sont reliés les uns aux autres par un rapport de cause à effet. Nous avons, en effet, trouvé un enchaînement rationnel de thèmes tels que Dieu, la mort, le droit et la morale, l’histoire et le progrès, la fatalité et la liberté qui témoignent de préoccupations philosophiques. De plus, nous avons souligné la récurrence de schèmes comme ténèbres et abîme, ombre et lumière, bien et mal, grotesque et sublime. Nous avons constaté donc que les antithèses, dont Hugo use, ne sont pas de simples figures rhétoriques. Elles expriment une vision du monde conçue comme un éternel combat entre les forces antagonistes du bien et du mal.
C’est ainsi que sur la terre-géhenne, la terre-cachot, la terre-abîme, l’homme a deux issues pour échapper au mal :le premier c’est l’amour chaste, le second c’est la clairvoyance divine. Perdant ces deux repères, l’homme subit l’enfer sur terre. Dieu refait l’Éden pour l’homme ; c’est à ce dernier de ne pas perdre son Éden. L’homme, est donc libre ; c’est lui qui par ses actions volontaires, choisit de bâtir son enfer sur terre ou bien son paradis. Pour ne pas perdre son paradis, il n’y a qu’une solution, selon Hugo : résister à la chair et à Satan. Comme nous l’avons dit, l’homme peut résister à la chair incarnée par Josiane, par le truchement de l’amour chaste, ou l’âme, incarné par Dea. Pour résister à Satan, incarné par Barkilphedro, il faut obéir aux ordres divins et être sourd aux paroles de Satan. Dieu confie à l’homme, symbolisé par Gwynplaine, une mission sur terre. C’est à l’homme de ne pas dévier du chemin déterminé par Dieu. Gwynplaine se perd en disant « oui » à Barkilphedro. Et également lorsqu’il s’éloigne de l’âme, Dea, en désirant Josiane, la chair. Ainsi a commencé la chute de Gwynplaine, qui a perdu le bonheur et qui a été pris dans le tourbillon des péchés. Il a tout perdu en s’éloignant de l’âme ainsi que de Dieu.
Nous avons montré qu’Hugo en reprenant des mythes divers et les transformant, crée le mythe de L’Homme qui rit, un nouveau mythe hugolien. Nous avons démontré que tout le roman est une allégorie de la vie et de la destinée de l’homme. L’Homme qui rit est un mythe, c’est-à-dire un récit, qui répond aux questions existentielles qui hantent tout homme. Ce mythe de « l’homme qui rit », qui est Gwynplaine, est fondé sur la reprise et la transformation de plusieurs mythes: mythe de la «naissance du héros», mythe d’Œdipe, mythes de Caïn et de Prométhée, mythe de Sisyphe, mythe de la chute et finalement mythe titanique. Il est à noter que Pierre Albouy était notre point de départ en ce qui concerne la création mythologique chez Hugo, mais nous avons vu que notre corpus n’est pas uniquement un mythe titanique; en fait c’est une reprise transformatrice d’un certain nombre de mythes. Nous avons postulé qu’à travers le recours aux différents mythes, Hugo crée le mythe du peuple souffrant, c’est-à-dire l’Homme souffrant sur une terre-châtiment.
Selon cette philosophie hugolienne, l’enfer est sur la terre. L’Homme n’a pas besoin de mourir pour aller en enfer. Son passage sur la terre infernale est un voyage ayant pour but d’obtenir le salut de Dieu. L’enfer est conséquence des péchés humains, des faiblesses charnelles et morales. La chair et Satan sont les deux forces maléfiques qui éloignent l’homme du paradis. En revanche, il faut remarquer que l’enfer, le paradis et le purgatoire aussi se trouvent dans l’ « ici-bas ». Alors que le royaume de Dieu où il y a le vrai bonheur est « là- haut ». Gwynplaine avertit que l’homme se perd quand il profane le divin en lui, quand il perd les valeurs morales, quand il se dégénère en profitant des inégalités sociales. Donc, c’est l’homme par ses actions qui détruit son paradis en choisissant l’enfer.
En ce qui concerne le purgatoire, Hugo ne le différencie pas de l’enfer. Nous avons remarqué que le mal est un gouffre où descend celui qui se détourne de Dieu. Dans le labyrinthe de la vie, l’homme doit profiter de son existence pour être heureux, pour échapper à la souffrance. L’existence sur terre est plus proche de l’enfer que du paradis. Si pour Dante le paradis terrestre existe, pour Hugo l’enfer terrestre existe.
La cosmogonie hugolienne est basée sur une force qui nous dépasse, se dévoile dans sa totalité quand le personnage se rend compte du mystère de la vie. C’est alors que Gwynplaine choisit de quitter cette existence et d’abandonner son corps terrestre pour vivre heureux dans l’éternité. L’Homme, symbolisé par Gwynplaine, sort de sa coquille dans le but de maintenir une relation avec la société. Mais il se bute à l’incompréhension totale. Il devient la risée de la société (l’Assemblée). Perdant son paradis sur terre, Gwynplaine choisit de mourir pour renaître autrement. Le suicide est compris comme un acte de délivrance; il peut même représenter le refus de vivre dans une société injuste. La mort de Dea représente pour son amant la fin de son paradis sur terre. Par le suicide, il quitte le monde d’ «en bas» pour rejoindre Dea au ciel et revivre son paradis, où se trouve le vrai bonheur.
Nous pensons avoir démontré que l’œuvre hugolienne est un «tout indivisible» comme le dit Hugo lui-même. Nous avons eu recours à plusieurs œuvres hugoliennes, afin de pouvoir comprendre en profondeur le sens du roman, objet de notre étude. Nous avons pu aboutir aux idées qui nous semblent avoir participé à la genèse des idées hugoliennes. Nous pensons avoir abouti à la source du mal chez Hugo. Dans Post-scriptum de ma vie et dans Ce que dit la bouche d’ombre, Hugo a déterminé l’imperfection de la création, « la matière » comme source du mal. En réalité, cette idée réfère à Plotin qui a dit que les fautes viennent de la domination de la matière sur l’homme. C’est ainsi que pour Hugo, comme Plotin, l’homme peut dominer le mal par l’âme. Hugo est d’accord avec Descartes, Leibniz, et Spinoza sur la perfection de Dieu. Mais il s’oppose à l’idée de la perfection du monde et de l’homme affirmée par ces philosophes.
Le mal, d’après notre écrivain, comporte responsabilité et liberté de la part de l’agent humain. L’existence du mal dans l’univers est fatale dans le sens d’essentielle pour accomplir le bien. En effet, la fatalité du mal coïncide avec l’idée de l’utilité du mal. De plus, le mal dans L’Homme qui rit peut se définir par l’association de deux responsabilités : celle de l’homme et celle d’une instance supérieure «du haut de laquelle le colossal spectre du mal laisse tomber des poignées de serpents sur la terre » . Dieu ne crée pas le mal; de plus le mal est, en réalité, souvent un bien. Hugo multiplie les raisons de la fatalité du mal: « la souffrance pour la souffrance n’est pas. Rien n’existe sans cause : la souffrance est donc invinciblement ou un châtiment ou une épreuve, et, dans tous les cas, un rachat » . Pour Hugo, Dieu ne laisse pas l’homme livré aux maux et à la souffrance, l’homme possède un point d’appui : la prière. Ainsi l’auteur de L’Homme qui rit justifie donc l’existence du mal sur le plan divin. Dans cette optique, Hugo s’oppose à tous ceux qui pensent que Dieu est « méchant », ou bien ne s’intéresse pas à l’homme comme Epicure et Voltaire le pensent. Il s’oppose de même à ceux qui croient que Dieu prive l’homme de sa liberté comme Spinoza selon lequel l’homme se croit libre, mais il ne l’est pas, car tout est déterminé par Dieu.
Hugo ne rejette pas sur l’homme la responsabilité de l’introduction du mal dans le monde comme le fait la mythologie grecque. Le mal a précédé la création de l’homme comme Paul Ricœur lui aussi l’a dit. L’introduction du mal dans l’univers est attribuée aux dieux ainsi qu’à Satan. D’après le Judaïsme, le christianisme et l’Islam, c’est le diable qui a trompé Adam. C’est ce dernier qui a introduit le mal par le péché, en désobéissant aux ordres de Dieu.
Pour dissiper toute confusion, nous sommes convaincue qu’Hugo présente deux formes du mal comme nous l’avons dit : le mal cosmique et le mal socio-humain. Mais il faudrait prendre en considération que le mal cosmique est justifié, a un but qui est le bien, même si ce bien prend la forme d’un mal comme par exemple le châtiment. Alors que le mal socio-humain n’est pas justifié ; c’est un mal pour le mal. En ce sens, il n’y a qu’une forme vraie de mal pour Hugo ; c’est le mal socio-humain. C’est l’homme qui, sous l’effet de la déchéance morale (Josiane), de l’ignorance (les lords et les comprachicos) ou de la faim (Barkilphedro) choisit de commettre les fautes. Mais Hugo n’attribue pas le mal à la nature humaine. D’après lui, l’homme ne naît pas « monstre », il le devient sous l’effet d’un autre homme, de la société, de lui-même, c’est-à-dire à cause de ses propres choix. Même l’homme méchant est victime d’un mal extérieur ou intérieur. Le mal est une chaîne infinie dont on ne peut déterminer la source première. Gwynplaine est victime d’abord du roi, des comprachicos, de Josiane, de Barkilphedro. En même temps, il est coupable; il abandonne l’amour pur de Dea pour Josiane, laisse la douce vie familiale de la cahute pour la vie chaotique vicieuse du palais, s’écarte du droit chemin de Dieu, oublie la mission que Dieu lui a conféré. Même Barkilphedro, « le vrai méchant », est victime de la pauvreté, de la faim, peut-être, ne deviendrait-il pas méchant s’il était heureux. Bref, Hugo pense comme Aristote et Pascal que l’homme n’est ni bon ni méchant. Personne donc n’est méchant tout à fait volontairement comme le pensait Socrate.
Dans L’Homme qui rit, nous avons constaté que le monde social est un « piège » en se révélant comme un labyrinthe dans lequel l’homme se perd. Nous avons remarqué que le refus de la société est un refus de la société monarchique qui est décrite à travers la peinture de l’aristocratie, qui semble devenir la forme pervertie de la civilisation ; les personnages recherchent donc l’idéal dans la nature, « monde de l’âme», à l’opposé de la société « monde du corps ». Hugo semble ainsi influencé par les idées de Hobbes et celles de Rousseau. Hugo donne une solution pour « détruire la misère », ou bien le mal qui est partout dans l’univers. Cette solution est la révolution qui se réaliserait dans l’avenir ; selon lui, il vaut bien mieux pour la société « fausse » de construire la « société vraie » où « il n’y aura plus de seigneurs, il y aura des vivants libres ». En effet, il croit en l’avenir comme Voltaire, comme Lamennais.
En effet, nous avons montré par des exemples qu’Hugo ne condense pas uniquement les idées abordées dans ses propres œuvres, mais aussi celles traitées dans les œuvres d’autres écrivains.
Malgré l’importance que l’auteur de L’Homme qui rit attribue à la question sociale, Hugo met la question humaine au-dessus de toute autre. Il crée des archétypes symbolisant le vice ou la vertu ou l’un et l’autre. Il semble que les personnages peuplant L’Homme qui rit soulèvent des questions qui se posent à la société dans tous les lieux et dans toutes les époques. Gwynplaine incarne la victime des conspirations politiques et le peuple victime d’une société inégalitaire, Josiane, la jeune aristocrate amorale, Dea la jeune amante vertueuse, alors que Barkilphedro représente Satan qui tente de tromper l’homme, les comprachicos représentent l’être criminel en proie à la pauvreté, Ursus est le philosophe ou bien le misanthrope qui a ses raisons pour vivre à l’écart de la société.
Il importe encore de souligner qu’en affrontant le problème du mal, les différents personnages entraînent une multiplicité de points de vue. Ces opinions qui soulèvent des questions philosophiques ouvrent une pluralité de questions sans aboutir forcément à une réponse unique à la problématique du mal, conformément à la dimension polyphonique du roman.
En réalité, il faudrait peut-être souligner que cette polyphonie résulte de la nature de L’Homme qui rit en tant que roman philosophique. La philosophie s’est montrée au cours des siècles insuffisante en abordant ce problème. Pour l’esprit humain, l’existence d’un Dieu bon et celle de diverses formes du mal posent un problème insoluble. Si certains philosophes expliquent que l’homme est la source des maux, parce qu’il fait un mauvais emploi de sa liberté, d’autres soulèvent la question suivante: si l’homme est responsable de la guerre, par exemple, qui est responsable des catastrophes naturelles ? de la naissance des enfants déformées ? Si Dieu est puissant comme l’affirment les religions pourquoi le mal existe-t-il? Pourquoi Dieu n’intervient-il pas pour l’arrêter ? ……..
Une multitude des questions qui restent toujours les mêmes sans trouver de réponse définitive.
Enfin, nous espérons pouvoir creuser la problématique du mal chez Victor Hugo dans d’autres œuvres, ou bien l’aborder chez d’autres romanciers obsédés par ce problème, qui hante l’être humain. Nous aspirons également à une étude approfondie comparant L’Homme qui rit à d’autres œuvres comme Tom Jones de Henry Fielding à titre d’exemple. Victor Hugo a-t-il réussi à faire de l’Homme qui Rit un prototype, une antonomase, à l’égal de l’Harpagon de Molière? Y a t-il encore une possible analogie entre l’enfer sartrien dans Huis Clos avec sa formule trop connue « l’enfer, c’est les Autres » et la vision hugolienne du mal telle que nous l’avons dégagée? Plus encore, l’influence de la forme spirale de Dante sur l’imaginaire hugolien pourrait être un sujet de recherche possible.